Interview de Francis MESLET
– Quelques mots pour te présenter :
Diplômé major en Design de l’École Supérieure d’Art de Nancy en 1986, j’exerce le métier de designer durant une courte période puis me tourne rapidement vers la communication comme Directeur Artistique. Après 30 années passées à triturer le concept créatif, je suis aujourd’hui Directeur de Création. Je parcours le monde à mes heures perdues, à la recherche de lieux abandonnés, sanctuaires sur lesquels le temps s’est arrêté. J’en ramène des images saisissantes, capsules temporelles témoignant d‘un univers parallèle propice à l’évasion de l’esprit et à l’interrogation…
– Quand et comment es-tu tombé dans la photo ? Qu’est-ce que cela représente pour toi ?
J’ai étudié la photographie à l’École Supérieure d’Art de Nancy entre autres disciplines. Ce n’était pas mon moyen d’expression préféré à l’époque. J’étais plutôt attiré par le graphisme, l’illustration et le design. Mais j’ai remis le pied à l’étrier en 2009 avec l’achat d’un boitier plein format numérique. De fil en aiguille, intéressé par l’architecture et le patrimoine j’ai commencé à visiter des lieux à l’abandon dans le Grand-Est de la France. Puis rapidement cette passion m’a conduit beaucoup plus loin… jusqu’au Japon par exemple. Cela représente pour moi un moyen d’évasion vers le silence et la solitude aussi bien qu’une façon de partager avec autrui les images et les interrogations que je ramène de mes voyages.
– Quels sont les sujets qui t’intéressent ? qu’est-ce que tu y cherches, y trouves ?
Les endroits abandonnés parce qu’ils ont fait place au silence au fil du temps. On n’y entend plus guère ici que le bruissement du vent par une vitre cassée ou là, le rythme syncopé d’une goutte d’eau qui perle d’un plafond ravagé. Ces silences appellent pourtant le visiteur exceptionnel de tels lieux. Dans cette centrale électrique, des ordres étaient criés en allemand, dans ce collège catholique français, les cris d’enfants résonnaient au son de la cloche, mais qui peut imaginer les sons cachés derrière les murs de cet ancien asile psychiatrique en Italie ou sur les quais de cette île abandonnée au large du Japon ?
J’y trouve une forme d’apaisement qui n’est que provisoire car le besoin de repartir se fait sentir assez rapidement régulièrement.
– Qui sont les photographes qui t’inspirent ou dont tu apprécies particulièrement le travail ?
Jan Saudek, Josef Koudelka, Pentti Sammallahti, en France, Raymond Depardon, Thomas Jorion…
– Qu’est-ce que tu présentes dans ton exposition ?
Avant la chute du mur en 1989, chaque village d’Allemagne de l’Est avait sa salle des fêtes. Des générations de villageois venaient oublier chaque week-end la rudesse de la vie quotidienne en faisant la fête. En dansant. Les villages rivalisaient entre eux à grand renfort de déco avec les moyens du bord. Après 1989, inexorablement les salles ont été désertées, oubliées, abandonnées .J’ai visité une trentaine de ces salles abandonnées. Les accès ne sont pas toujours faciles. Interdits dans la plupart des cas. Quand on voit l’état de certains planchers et plafonds on comprend rapidement pourquoi. Ici, je vous présente une sélection de certaines de ces salles. Si vous prêtez bien l’oreille vous entendrez peut-être la fête battre son plein.
– Et pour la suite ? Des projets, des envies de découvertes, d’évolution ?
Pour la suite toujours et encore de nouvelles explorations de lieux abandonnés en Europe et plus loin encore. Des expositions, la sortie de mon second livre en septembre/octobre 2020 consacré aux lieux de culte abandonnés. J’aimerai consacrer encore davantage de temps à cette passion. En vivre sans compromis (ce qui est un doux rêve et un leurre en soi). Si j’ai pu rester aussi libre de choisir mes sujets et la façon de les montrer c’est justement parce que je n’ai pas besoin d’en vivre.
-Lien hypertexte vers le site internet où l’on peut te retrouver :
francismeslet.com